Je vous parlais sur la page Facebook du mois de l’histoire des noirs. C’est un évènement censé célébrer et reconnaitre les contributions des Canadiens noirs à l histoire du pays. Le mois de l’histoire des noirs est un sujet qui divise. J’en parlerai plus longuement dans un autre billet car ce n’est pas de ça qu’il est question aujourd’hui .
Le mois de l’histoire des noirs, ce sont des célébrations en tout genre. C’est donc tout naturellement que l’école du mini Gaou a décidé de participer à la fête en demandant aux enfants et donc aux parents leur contribution.
Il y a quelques jours j’ai reçu, un courrier me demandant si je souhaitais faire découvrir la culture de mon pays à l’école . Si vous vous demandez comment ils ont su que j’étais noire et Africaine, sachez que lors de l’inscription du mini Gaou, j’ai eu à remplir un formulaire où je devais indiquer si nous étions membres d’une minorité visible et ethnique. Ce document s’appelle le formulaire d’auto identification. Il n’est absolument pas obligatoire mais je l’ai rempli. Ce papier fera lui aussi l’objet d’un billet dans quelques temps. Formulaire mis à part je pense qu’au bout d’un moment ils auraient fini par voir que je suis noire…
Bref revenons à l’école et à son enthousiasme à fêter l’histoire des noirs. J’ai donc reçu un document me demandant si oui ou non je voulais participer. En plus du questionnaire, il y avait une série de règles à respecter pour pouvoir participer. Il faut je cite : » apporter des mets en lien avec sa culture d’origine et présenter des danses et costumes traditionnels. »
Mister Gaou et moi avons été pris d’un fou rire en lisant ces indications très précises. Je sais que ça part d’un bon sentiment et que c’est pour des enfants. Mais la râleuse que je suis n’a pu s’empêcher de se demander pourquoi, la requête de l’école en terme de culture noire pour reprendre leurs mots, se réduit à quelques plats exotiques et à des danses? Le fait de préparer un yassa poulet, une sauce gombo et d’aller danser l’azonto ou l’apkèssè dans un gymnase va-t-il vraiment célébrer l’histoire des noirs? Ne pourrait-on pas trouver une manière un peu plus intellectuelle de célébrer les noirs ? Sommes nous condamnés à être réduit à ces clichés? Au Togo comme au Sénégal, nous avons des contes et des comptines magnifiques qui sont disponibles sur internet et sur CD. Les histoires ont une morale et plairaient très certainement aux enfants. On pourrait aussi parler de la fabrication des instruments de musiques typiquement Africains comme le balafon ou la cora. Pourquoi ne pas leur parler , des traditions, des dialectes et langues africaines et de leur complexité, des outils et des métiers qui n’existent que chez nous? On pourrait leur expliquer le rôle des chefs traditionnels dans nos sociétés et parler de la façon dont la colonisation l’a transformé. Je suis issue d’une ethnie dans laquelle c’est la femme qui transmet sa légitimité au roi, les fameuses sociétés matriarcales ; on pourrait en parler et expliquer de quelle manière ça impacte la famille. Pourquoi ne pas leur expliquer comment les premiers noirs sont arrivés au Canada? On pourrait aussi leur parler d’esclavage, de Senghor, de Cheikh Anta Diop, d’apartheid, de Nelson Mandela et de colonisation. Bref les sujet sont nombreux et variés. Chaque sujet pourrait être adapté à l’âge des enfants, documenté avec des ouvrages sérieux et présenté par des parents qui maitrisent les thèmes qu’ils abordent afin d’éviter de tomber dans des lieux communs et des clichés réducteurs. L’Afrique est un continent riche sur tous les plans: il est vraiment dommage de le réduire aux épices et au mythe du bon sauvage qui a le rythme dans le sang.
Le Canada est un pays très ouvert et encore une fois, je sais très bien que la proposition de l’école part d’un très bon sentiment. Je suis vraiment heureuse que dans une école au Canada on me demande de venir parler de mon pays. Qu’on comprenne (enfin) que je n’ai pas besoin de renier le Togo ou le Sénégal pour apprécier le Canada. C’est une chance unique, tout ça est nouveau pour moi, j’apprends à l’apprécier et j’en suis ravie.
Mais en tant qu’Africaine et râleuse professionnelle , je remarque souvent, que lorsqu’on pense culture noire Africaine en Occident, les premières (et seules?) choses qui viennent à l’esprit sont souvent les plats épicés et le tam-tam.
Je vais faire une proposition à l’école et j’espère qu’elle l’acceptera. De toute façon une fois qu’ils m’auront vu danser, ils comprendront qu’il vaut mieux me laisser raconter une histoire aux enfants. C’est un sujet qui me touche énormément parce que, même si sa mère se comporte souvent parfois comme Karaba la sorcière, je ne veux pas que ma fille grandisse en pensant que l’histoire de Kirikou est inspirée de faits réels.
Catégories :Le coins des petits Gaous, Le Gaou est fâché, Une vie de Gaou
Chez nous, c’est en novembre! Les clichés ont la vie dure. Mes élèves anglophones s’attendent toujours à me voir débarquer avec un béret et un collier d’ail. Même les adultes sont surpris quand je leur dit que je n’ai jamais mange d’escargot ou de grenouille.
LOL. Moi non plus je n’en ai jamais mangé et mon mari non plus! En revanche mon père qui n’a jamais vécu en France a mange et aime beaucoup les cuisses de grenouilles. Comme quoi 🙂
Au secondaire il est présenté différemment, on évoque les thèmes dont tu parlais en haut. On a également lancé un concours de poésie et on précise aux élèves qu’il ne s’agit pas que du mois des noirs mais aussi de celui de toutes les « minorités visibles » (j’aime pas vraiment ce terme mais bon).
Je m’investis beaucoup pour ce spectacle et j’espère qu’il sera réussi! Tout le mois de février sera ponctué de conférence et exposition, un vent de culture souffle enfin dans mon école. Et ça fait du bien 🙂
C’est super dans ton école 🙂 . Je pense que l’école de ma fille a voulu simplifier comme il s’agit de touts petits et c’est cela que je trouve dangereux parce que c’est justement a cet âge qu’ils sont le plus réceptifs! Je croise les doigts pour ton spectacle 🙂
Eh bein dis donc…lol. tu as raison la Couze pour kirikou ;-)…bon courage dans cette aventure!
J’adore l’humour avec lequel vous prenez la chose. C’est vrai que les clichés et stéréotypes ont la vie dure. Aux US l’étude de l’héritage noir (African American) est différente du Canada mais identique à votre expérience pour toute personne qui vient d’un pays d’Afrique.
Cela étant après toutes ces années aux US on attend aussi de moi que j’amène des crêpes si on parle de la France. On me demande aussi s’il est vrai que les enfants boivent du vin à table et si les femmes maintenant s’épilent. Et ce ne sont pas des questions posées là où on s’y attendrait, dans des petits villages au cœur du pays.
Mais tout comme vous je pense que les écoles et les enseignants font un effort colossal en Amérique (Canada et US) pour favoriser l’intégration et l’ouverture d’esprit. Mes amies et famille françaises nous envient cela. A nous de présenter aux Canadiens et Américains d’autres aspects plus contemporains de nos pays d’origine. Enjoy!
Je suis pas contre l’idée d’une petite danse. Je te propose mon aide au gaou pour l’azonto ou encore le skelewu qui cartonne fort en ce moment. Bon début de semaine à toi.
Je connais pas le sekewulu loool
Voici le lien qui te permettra de démystifier cette danse :